Épisode 5
Les prisonniers
Deuxième jour sur l'île, et le plus beau lever de soleil pour l'instant. Les soldats boisés de GrandeForêt sont réveillés par le même spectacle qui les a bercé tard la veille. Sol vient prendre la place de Mani en cette nouvelle journée qui s'annonce radieuse.
Les petites créatures forestières, normalement habituées à la grasse matinée, sont sorties de leur sommeil par un concert de frappes. Au bord des falaises de l'île, torses nus, haches en mains,
Arnold et
Blase taille un imposant tronc.
Depuis la bêtise de
Vilfrid et du viking lokiesque,
Arnold s'est mis en tête de remettre leur pauvre drakkar à flot. Pour l'instant, à part bronzer sur les plages, entrailles à l'air, l'embarcation n'est d'aucune utilité.
Plus tôt, avant que les deux apprentis bûcherons commencent leur labeur,
Barde s'était mis à la recherche de plantes médicinales ; juste au cas où.
Plus loin, assis sur le promontoire de la montagne centrale, le reste du groupe observe les alentours. L'île, et le beau temps, offre une grande partie de sa superficie aux carnets de
Blase, gribouillé proprement par
Vilfrid, agenouillé, langue coincée entre ses lèvres, cherchant à s'appliquer du mieux qu'il le peut pour représenter fidèlement GrandeForêt.
Une mise en carte de l'île a été demandé par
Freyja.
Accompagnée de
Gunhild, et ayant été accompagné par
Vilfrid, elle observe méticuleusement les sommets enneigés de la montagne, à la recherche de quelque chose.
Du moins, c'est ce que pense
Gunhild qui ressent l'insistance de son amie à épier les hauteurs.
"Alors ? L'abominable viking des neiges ? Tu l'as trouvé ?
- Ça ne saurait tarder...
- Une bonne heure que l'on est là, et j'ai l'impression que tu n'as pas quitter cette montagne des yeux...
- Bonne impression, Gunhild. Ton aura est fort développé !
- Qu'est ce que tu recherches ?
- Rien de particulier..."Freyja s'approche un peu plus des versants du promontoire.
Gunhild la suit prudemment. La curieuse entame une série de positions destinée à lui donner un meilleur point de vue du pic glacé.
"Cette montagne... commence
Freyja en se relevant.
Elle n'est pas normale...
- Elle est trop penchée à ton goût ?
- Je ne sais pas... Il y a quelque chose qui cloche...
- Quoi donc ?
- Sa forme... est bizarre.
- Bizarre ? Bizarre comment ?
- Vraiment trop bizarre...
- Tu deviens paranoïaque ma parole ! s'exclame
Gunhild.
- Peut-être...
- J'ai fini ! lance
Vilfrid en s'approchant des deux amies.
GrandeForêt a la taille de Beurk, approximativement.
- Bon... L'exploration ne devrait pas être compliqué. assure
Gunhild, jouant avec sa double lance.
Du moins si je me représente bien la descriptions que vous m'avez faite de votre île.
- Pour ce qui est de la carte... Je ne suis pas trop mécontent de moi, mais Blase dessine mieux que moi... Pourquoi l'avoir laissé avec Arnold ? demande
Vilfrid en fermant délicatement le petit carnet cartographique avant de le ranger.
- Parce qu'il est hors de question d'être "Lokié" aujourd'hui. répond
Gunhild en frappant le sol de son arme.
Attends ! Blase dessine mieux que toi ?
- Ce n'est pas compliqué. Je suis plus écriture. Le dessin, je trouve ça barbant. Trop long, trop long et trop long. Il faut être trop patient pour dessiner.
- Pourtant, patient, c'est ce qui te défini le mieux Vilfrid. déclare
Freyja.
- Pas pour cette activité...
- Bon, maintenant que l'on a fini les croquis de l'île, que fait-on ? questionne
Gunhild.
- On pourrait commencer l'exploration. propose
Vilfrid.
- Allez-y. Je pense que je vais m'offrir une petite séance d'escalade. déclare
Freyja.
- Quoi ? demande
Gunhild.
- Escalader ? Quoi, la montagne ? poursuit
Vilfrid.
- Oui.
- Toute seule ? continu
Vilfrid.
- Pourquoi pas.
- C'est limite vexant, ça. sourit
Gunhild.
Pourquoi ne pas accepter notre compagnie ?
- Je ne vais pas vous forcer. Si vous avez un trou dans votre emploi du temps sûrement surchargé, j'accepte votre présence avec joie. répond
Freyja en commençant l'ascension.
- Mais... Y'a un projet particulier pour cette envie d'escalade ? questionne
Vilfrid, en suivant le mouvement.
- J'aimerai prendre de la hauteur. Mais surtout, j'aimerai examiner ce sommet d'un peu plus près. J'ai l'impression que la neige nous cache quelque chose." explique
Freyja.
Haussant les épaules,
Vilfrid entame le pas de
Gunhild, collée à
Freyja.
"On peut faire une pause ?"Blase, sa hache coincé dans le tronc d'un arbre abattu, transpirant à grosses gouttes, s’assoit avec difficulté contre une souche.
Arnold, observé par son corbeau, intrigué par les efforts de son maitre, se redresse en s'épongeant le front.
Au bord de la falaise, seulement quatre troncs sont prêts à être descendu sur la plage afin de reconstruire le drakkar que
Blase et
Vilfrid avaient démembrés pour bâtir les palissades coincées contre la falaise ; permettant la jonction entre la forêt et les plages, du moins jusqu'à la découverte d'un passage plus simple.
"Tu as raison... souffle
Arnold.
Malgré notre faible avancée... On peut s'accorder une petite pause... Le soleil est cuisant aujourd'hui...
- Tu ne veux que l'on aille faire un tour sur la plage ?
- Comment ça ? demande
Arnold, intrigué.
On peut rester ici et profiter de l'ombre des conifères.
- Sur la plage, en plus d'avoir les apports frais de la mer, on aura les vents marins qui viendront se briser sur les roches de la falaise. Ça nous rafraichira.
- D'accord... Allons-y."Les deux amis descendent alors vers la plage, empruntant leur palissade.
Puis, ils logent la mer,
Arnold jetant quelques regards plaintifs en direction du drakkar, allongé sur le sable.
Blase, quant à lui, s'amuse à trottiner sur les bords de la mer, riant à gorge déployée, se qui amuse
Arnold qui s'empresse de le rejoindre.
Un peu de détente par Nanna !
Et tandis que les deux vikings slaloment sur les vaguelettes,
Plume, depuis les cieux, recherchent un individu. Une créature. Comme lui, en plus gros, en moins plumeux, en plus carnivore, en moins discret...
Là !
Le corbeau ralenti dans son vol et entame une descente rapide.
Il atterrit en douceur sur un rocher baignant dans le sable, à l'ombre d'une crête rocheuse. Juste à ces côtes, profitant également de la pénombre, le dragon de feu dort paisiblement, roulé en boule.
Plume croasse en voyant arriver à grande allure les deux vikings qui s'arrêtent en face du dragon, reprenant leur souffle.
"Tiens... Il est là lui ? s'étonne
Blase.
- Bah... Il se repose. Il est toujours blessé.
- Oh ! Un seau... remarque
Blase en ramassant le récipient, ballonné par les vagues.
- Il faudrait d'ailleurs penser à l'étudier. déclare
Arnold sans se préoccuper de la trouvaille du petit viking.
Ça m'étonne que Freyja ne l'ait pas déjà fait... N'y pense même pas !"Sur ces mots,
Arnold bloque le passage à
Blase qui, ayant rempli son nouveau jouet, s'apprêtait à "Lokier" l'endormi.
"J'aurai essayé... soupire le petit viking en jetant son seau dans la mer.
- Allez ! On retourne à notre œuvre !" "Freyja !" cri
Vilfrid, à moitié à ramper dans la neige.
L'ascension commence à devenir de plus en plus ardue... Pourtant, les conditions d'escalades sont plus qu'agréables : pas de déchainements de vents violents et/ou glaciaux ; une petite brise, rien de plus ; de tempêtes de neige, d'avalanches (sauf si
Vilfrid continu de hurler à tout bout de champs) et pas d'apparition d'abominables vikings des neiges.
La pente est juste devenue plus abrupte, forçant le groupe à s'allonger sur la poudreuse pour avancer. A chaque mouvement, les vents légers soulèvent quelques milliers de flocons qui s'envolent rejoindre les frontières du Valhalla, parmi les blancs nuages.
"Qu'y a-t-il ? répond
Freyja, en évitant de jeter un regard vers
Vilfrid, de peur de contracter un vertige.
- Je ne pensais pas que l'ascension serait aussi... compliquée. Ne serait-il pas envisageable de penser à rester en vie ?
- Et pourquoi ont seraient rappelés aux Dieux ? demande
Gunhild.
- Oh... Je ne sais pas... Un accident est si vite arrivé... Loki qui déclenche une avalanche, ou Bertha pourrait dans un élan de folie nous geler sur place...
- Mais pourquoi voudraient-ils ça, Vilfrid ? interroge
Gunhild, avant de sentir quelqu'un l'attraper par le col de sa tunique et la lever.
- On est arrivé !" annonce
Freyja.
Gunhild est soulevée puis posée sur une corniche, faisant chuter plusieurs grammes de neige dans le vide. Puis, c'est au tour de
Vilfrid d'être aidé.
"Quelle force ! s'étonne
Gunhild.
Impressionnant...
- On est des vikings. Ça a toujours été un de nos critères. sourit
Freyja en se rappelant qu'
Harold n'avait pas toujours été ainsi.
- Quelle vue aussi..."Vilfrid a raison. La cime de la montagne a transporté le groupe de viking dans un autre monde, où la fraiche des cieux se mélange à la chaleureuse chaleur de Sol.
Freyja se redresse, imité par ses compagnons. Doucement, elle ferme les yeux, écarte les bras et inspire profondément. Elle rouvre les yeux en éclatant de joie, qu'elle traduit par un rire fier.
C'est si bon se dit-elle tandis que le souffle ascendant vient caresser ses cheveux.
Le dixième monde ! Un paradis surpassant les offres d'Asgard même !
Depuis ce promontoire naturel, toute l'île, sans exception, fait face aux vikings.
Vilfrid avait vu juste, elle n'a pas l'air plus imposante que Beurk.
"Et maintenant ? interrompt
Gunhild.
Désolée de rompre un moment de délice et d'extase, mais que fait-on à présent ? Je suppose que tu ne souhaitais pas seulement nous offrir cette vue imprenable sur GrandeForêt.
- Non, en effet..." dit
Freyja en se retournant.
Elle commence à observer, accroupie, les petits tas de neige, sous les regards perplexes de ses amis.
Puis, elle lance :
"Là !"Vilfrid et
Gunhild la rejoigne.
Freyja déneige prestement une stèle de pierre, étrangement semblable à...
"On dirait celle de la plage ! réplique
Vilfrid.
- Une stèle ? s'étonne
Gunhild.
Ici, au sommet de ce pic ? C'est ça que tu as aperçu depuis le promontoire ?
- Pas vraiment... C'est plutôt une forme... répond
Freyja.
- Une forme, tu dis... murmure
Vilfrid en caressant la plaque où y est inscrit le même dialecte que sur sa jumelle et que
Vilfrid semble pouvoir déchiffrer, avec peine malheureusement.
- Qu'est ce qu'il y a ? demande
Freyja.
- C'est bizarre... avoue
Vilfrid.
Quels étaient les mots de l'autre stèle ?
- Malédiction, dragon, Loki, fragments de pierres. se souvient
Gunhild.
Pourquoi ?
- J'ai l'impression que nous avons à faire ici au texte manquant... Celui de la plage, ce n'est pas parce que le texte était illisible. expose
Vilfrid.
Mais parce qu'il n'était pas complet...
- Et donc ? Les inscriptions ? s'empresse de demander
Freyja.
- Attendez ! lance
Vilfrid.
Ne me brusquez pas dans ma quête de spiritualité profonde !
- Pardon. excuse
Gunhild.
Prend ton temps.
- En dépêchant un peu, tout de même. poursuit
Freyja.
Il commence à faire froid...
- Malédiction, dragon, Loki, fragments de pierres. récite en chuchotant et en boucle
Vilfrid.
Hydromel, skreid, et petites noisettes...
- Attends... Pourquoi tu chantes des aliments ? demande
Freyja.
- Ça m'aide à la concentration... répond l'interrogé.
Lait de yack, alcool et sveitardrykkja...
- Sveitardrykkja ? Ce n'est pas un aliment... réplique doucement
Gunhild.
- Mais silence ! cri
Vilfrid.
Vous ne voyez pas que je me noie dans l'incompréhension totale de ses inscriptions ? Non mais halloo quoi ! Attendez... Ça y est !
- Conclusion ? questionne
Freyja.
- Enchainer, réveiller, déjouer et ramener... déchiffre
Vilfrid.
Ce sont des verbes...
- Viking obvious... soupire
Freyja.
Mais le rapport avec l'autre texte ?
- Je suppose... Enchainé à la malédiction... Réveil du dragon... Déjouer Loki... Ramener les fragments de pierre...- Qu'est ce que ça veut dire ? demande
Gunhild.
- Ça ressemble à une prophétie... marmonne
Vilfrid.
Les prophéties... Je n'aime pas les prophéties ! C'est chiant ! C'est casse noix ! Incompréhensible ! Une perte de temps ! Et en plus, c'est en relation avec les Nornes... J'aime pas les Nornes...
- Quoi ? Ce sont les Nornes qui ont fait ça selon toi ? s'étonne
Gunhild.
- Qui sait... tempeste
Vilfrid.
Bon... La suite ?
- Les fragments de pierre... répète
Freyja.
Comme celle-là ?"Et tout en disant cela,
Freyja sort de sous la neige un morceau de roche.
"Par Odin ! s'étouffe
Vilfrid.
Qu'est ce que c'est ?
- On dirait... commence
Gunhild.
- Un gros caillou ! fini
Vilfrid.
Regardez ! Il y a des inscriptions dessus ! Encore des inscriptions...
- Oui. confirme
Freyja.
Mais là... Elles semblent coupées... C'est sûrement un des fragments dont parle la stèle...
- Euh... Cela me paraît un peu gros quand même..."Gunhild se tait. Les deux autres vikings tentent l'oreille. Ils n'ont pas rêvés... La montagne tremble !
Les secousses se font de plus en plus violentes, provoquant une petite avalanche qui dégage toute la neige du sommet.
Les vikings se resserrent au centre du pic, observant la neige être évacuée.
Le sol commence doucement à apparaitre.
"Ce sol n'est pas normal..." s'exclame
Gunhild, la voix tremblante à cause des secousses interminables.
Soudain, un énorme choc fait perdre l'équilibre à
Vilfrid qui, par réflexe, attrape les jambes de
Freyja et
Gunhild. En manque d'équilibre, les deux femmes vikings tombent à la renverse, rejoignant le cortège de neige qui dévale de la montagne.
Lors de sa chute,
Freyja croit apercevoir un immense œil taillé dans la roche. Mais elle n'a pas le temps d'en voir plus, l'avalanche fait prendre aux vikings une vitesse de chute plus importante. Dans un concert de cri, ils sont emportés jusqu'au promontoire où
Vilfrid s'était tenu par faire le croquis du paysage.
"On a beaucoup trop de vitesse ! cri
Vilfrid en crachant de petites boules de neige qu'il a avalé par inadvertance lors de la chute.
- Oh non..." s'apitoie
Freyja, devinant la suite des événements.
Elle a vu juste.
L'avalanche amène les vikings au rebord du promontoire et les font plonger dans le vide, au dessus des armées de conifères de GrandeForêt.
"Oh mon Thor !!!"A travers les buissons de GrandeForêt, une ombre se jette à plat ventre dans un bouquet d'herbacée avant d'en sortir, hurlant à la mort et se grattant partout.
Elle s'applique prestement d'un cataplasme sur toutes les parties de son corps non protégés par sa longue tunique de guérisseur.
Celui-ci laisse échapper un soupire de soulagement avant de revenir côtoyer sa trouvaille, empli d'émerveillement.
"Urtica dioica ! Enfin, si j'en crois ce manuscrit d'herbologie que mes aïeux ont rapportés d'une expédition en Yr Hen Ogledd. Bon... Ça commence à dater, mais qu'est ce que c'est bon d'étudier ces ouvrages de connaissances ! Oh ! Et ça ? Qu'est ce que c'est ? Feuilletons... Bellis perennis ? Étrange... Cela devrait se trouver en plaines... Goutons cela ! Mouais... Pas fameux... Oh Eir !!! Toutes ses plantes trouvées dans GrandeForêt ! Les copains vont être contents !"Et alors que
Barde se relève, il tombe nez-à-nez avec...
"Athelas... Et non, non... Pas Athelas... En plus, ça n'existe pas... Euh... Arnica montana ! C'est la première fois que j'en vois ! Eir, tu me gâtes..."Barde se tait. Un tremblement de terre se fait sentir. Inquiet, il regarde autour de lui. Rien, rien de rien. Si ce n'est le sautillement de terre et de petits cailloux provoqués par...
Un craquement de branches ! Ou de troncs ! Ça se rapproche !
Barde tourne la tête et aperçoit, face à lui, un geyser de neige briser les arbres. Paralysé, à la fois par la peur, la fascination et l'incompréhension, il serre son manuel d'herbologie contre sa poitrine avant d'être happé par les neiges, poursuivant sa course folle.
"Tu as entendu ?"Arnold vient de stopper son avancée.
Blase, les pieds dans l'eau, s'arrête et tend l'oreille. Les deux vikings ne sont plus qu'à quelques mètres de leur défunte embarcation.
Plume, qui avait rejoint l'épaule de son maître, s'envole brusquement vers les cieux.
"Plume ? appelle
Arnold, sans comprendre.
- Arnold..." appelle
Blase, inquiet.
Arnold porte sans attention sur le viking bouffi, pointant du doigt la falaise.
Arnold se retourne pour voir déferler sur eux une cascade de neige.
"Mais pourquoi..." Un grand vacarme réveille le dragon rouge flamme en sursaut. Les sens en alerte, il quitte son abri pour rechercher la cause de ce bruit.
Il arrive alors devant un monticule de neige, fondant rapidement sous le soleil et la chaleur du sable. Le dragon aide à l'évaporation en soufflant dessus. Dans un geyser de vapeur, la neige laisse alors apparaitre le groupe de viking, exténué.
"Wouh ! Qui pour une autre descente ?!" s'exclame
Vilfrid en sortant de dessous la neige, bras en l'air.
Remarquant les regards noirs lui étant destinés,
Vilfrid s'assoit, penaud, dans le tas baissant de flocons.
Arnold se débarrasse à son tour de la froid matière et poussant des cris d'incompréhension :
"Mais ! Mais ! Quoi ?! Pourquoi il y a de la neige sur une plage ? Loki nous a frappé ?
- Loki ? Où ça ? Où ça ? s'exclame
Blase en cherchant tout autour de lui l'apparition de son dieu favori.
- Euh... C'est un peu compliqué à expliquer... hésite
Freyja, la neige jusqu'à la taille.
- Qu'est ce qui s'est passé ? s'affole
Barde en secouant son manuel de botanique.
J'étais en train de goûter une espèce de Bellis perennis et les nuages me sont tombés sur la tête !
- Ce n'étaient pas des nuages Barde, mais...
- Bellis perennis ? répète
Vilfrid, coupant
Gunhild dans sa phrase.
Tu les manges ? Mais tu es malade ? La Polypodium virginianum est bien meilleure !
- Mais taisez vous ! ordonne
Freyja.
J'essaye d'expliquer la cause des derniers événements à Arnold !"Un silence, pesant, brusque et gênant suit immédiatement les déclarations de
Freyja qui, surprise de s'être emportée de la sorte, se racle la gorge.
Arnold, les yeux baissés, se frotte nerveusement la nuque.
"Bon… Je disais… On est allé, Vilfrid, Gunhild et moi, sur le promontoire de la montagne pour dessiner GrandeForêt…
- Quoi ? Mais je suis meilleur dessinateur que vous tous ! Pourquoi je ne suis pas…"Blase s'interrompt, son regard croisant celui, sombre, de
Freyja.
"De toute façon, j'aime pas les expéditions… murmure
Blase.
- Donc, on est allé là-bas et j'ai décidé de monter un peu plus haut sur la montagne car j'ai cru voir quelque chose d'étrange…
- Comme ceci ?" coupe à nouveau
Vilfrid, tourné vers la montagne.
Les vikings se retournent et aperçoivent, ébahis, ce que la neige et la glace recouvraient : une immense statue de dragon, apparemment taillée dans la roche même, assis sur un socle de minerais. Il a la taille de la Mort Rouge ; dragon qu'avaient affronté
Harold et
Krokmou lors de leur première escarmouche ; avec une silhouette beaucoup plus fine, élégante.
"Alors ça... Je ne mis attendais pas... souffle
Freyja.
- Et ça ? Tu t'y attendais ?" demande de nouveau
Vilfrid, pointant cette fois la mer.
Bouches bées, les vikings observent à l'horizon les eaux de la mer s’élever dans les airs, comme si Njord ordonnait aux flots de bâtir un mur.
"Mais... Ça ne s'arrête pas !" s'exclame
Blase en montrant les extrémités de l'île.
Il a raison : la muraille liquide semble entourer GrandeForêt.
Aux côtés des vikings, le dragon commence à émettre des gémissements rauques. Doucement au dessus d'eux, le ciel s'assombrit et sur le plage s'écrase de grosses gouttes de pluie, forçant le dragon de feu à fuir vers son abri.
Ne comprend rien à ce qu'il se passe,
Freyja s'avance vers le bord de la mer, les yeux rivés sur cette vague immense se dressant au garde à vous.
"Quelque chose me dit qu'on a un problème..."